Paris sous les bombers

C’est ce qu’on appelle, littéralement, un film coup de poing : en mettant en scène deux bandes rivales dans le Paris des années 1980, Les Rascals emprunte à tous les codes du film d’action ultra efficace, tout en témoignant, tout aussi efficacement, de la montée du racisme en France. On en prend plein les yeux, plein la tête, et on en ressort totalement groggy – avec cette boule, au creux de l’ estomac, qui donne l’énergie de se révolter contre toutes les injustices de la société.
D’un côté, les « Rascals », bande d’amis cosmopolites, issus de la banlieue parisienne. Fils d’immigrés, ils écoutent du rock, découvrent le hip-hop (c’est l’époque où TF1 diffuse le cultissime H.I.P. H.O.P. : le légendaire présentateur Sidney fait d’ailleurs un émouvant caméo, sauras-tu le repérer ?) et se coiffent à la James Dean – genre Fureur de vivre. Ils ont 20 ans, l’âge des possibles. Sauf que leurs rêves d’insouciance se heurtent aux tensions sociales de l’époque, accentuées par les trahisons de la gauche au pouvoir (la montée du chômage et le tristement célèbre « tournant de la rigueur » : demande à tes aînés de te raconter le goût de la désillusion). Face à eux, les « Boneheads », skinheads à la nuque bien dégagée, portant rangers et bombers, graines de fascistes galvanisés par la récente percée du Front national aux élections européennes de 1984 (11 %).
Tout commence chez un disquaire des Halles, où un Rascal reconnaît le skin qui l’avait agressé enfant. Il décide de se faire justice lui-même, ce qui enclenche représailles et vendetta. Engrenage fatal, spirale de la violence, loi du Talion, banalisation du mal : Les Rascals filme avec fougue la fin de l’innocence – pour ses personnages comme pour l’ensemble de la société française.

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