Le Goncourt des lycéens décerné à Sabyl Ghoussoub
Quatre romans étaient en lice. C’est finalement Sabyl Ghoussoub qui a remporté le 35e prix Goncourt des lycéens pour son roman « Beyrouth-sur-Seine » (Stock). L’annonce en a été faite le 24 novembre en direct des salons de l’hôtel de ville de Rennes.
Après Clara Dupont-Monod en 2021 pour son roman S’adapter, c’est Sabyl Ghoussoub qui a remporté cette année le Goncourt des lycéens pour son roman Beyrouth-sur-Seine.
À l’issue de leurs délibérations régionales, les lycéens membres du jury avaient sélectionné il y a quelques jours quatre romans (sur une liste de quinze) que les académiciens n’avaient pas retenus dans leur première liste pour le prix Goncourt 2022. Il s’agissait de deux hommes et deux femmes : Nathan Devers pour Les Liens artificiels (Albin Michel), Sabyl Ghoussoub pour son récit autobiographique Beyrouth-sur-Seine (Stock), Sarah Jollien-Fardel pour Sa préférée (Sabine Wespieser) et Pascale Robert-Diard pour La Petite Menteuse (L’Iconoclaste).
Finalement, c’est Sabyl Ghoussoub, avec son roman drôle et émouvant, qui a donc le plus séduit les lycéens. Pour ce round final, ceux-ci étaient réunis à l’hôtel de ville de Rennes, lieu où a été créé ce prix en 1988. Organisé par la Fnac et le ministère de l’Éducation nationale, avec l’accord de l’Académie Goncourt, le Goncourt des lycéens a pour objectif, selon le ministère, « de faire découvrir aux lycéens la littérature contemporaine et de susciter l’envie de lire ». Il s’agit d’un des prix les plus prescripteurs, avec au moins 250 000 exemplaires vendus.
Dans Beyrouth-sur-Seine, Sabyl Ghoussoub met en scène un narrateur qui interroge ses parents sur leur départ du Liban pendant la guerre et sur leur arrivée en France. Âgé de 34 ans, Sabyl Ghoussoub est notamment chroniqueur littéraire au quotidien libanais L’Orient-Le Jour. Beyrouth-sur-Seine est son troisième roman.
Les finalistes
Nathan Devers – Les liens artificiels (Albin Michel)
« Il fallait la raconter, cette spirale. La spirale de ceux qui tournent en rond entre le virtuel et la réalité. Qui perdent pied à mesure que s’estompe la frontière entre les écrans et les choses, les mirages et le réel, le monde et les réseaux. Le cercle vicieux d’une génération qui se connecte à tout, excepté à la vie. » Alors que Julien s’enlise dans son petit quotidien, il découvre en ligne un monde « miroir » d’une précision diabolique où tout est possible : une seconde chance pour devenir ce qu’il aurait rêvé être… Bienvenue dans l’Antimonde.
Sabyl Ghoussoub – Beyrouth-sur-Seine (Stock)
Lorsque le narrateur décide de questionner ses parents sur leur pays d’origine, le Liban, il ne sait pas très bien ce qu’il cherche. La vie de ses parents ? De son père, poète-journaliste tombé amoureux des yeux de sa femme des années auparavant ? Ou bien la vie de son pays, ravagé par des années de guerre civile ? Alors qu’en 1975 ses parents décident de vivre à Paris pendant deux ans, le Liban sombre dans un conflit sans fin. Comment vivre au milieu de tout cet inconnu parisien quand tous nos proches connaissent la guerre, les attentats et les voitures piégées ? Déambuler dans la capitale, préparer son doctorat, voler des livres chez Gibert Jeune semble dérisoire, et pourtant ils resteront ici, écrivant frénétiquement des lettres aux frères restés là-bas, accrochés au téléphone pour avoir quelques nouvelles. Très vite pourtant la guerre pénètre le tissu parisien : des bombes sont posées, des attentats sont commis, des mots comme « Palestine », « organisation armée », « phalangistes » sont prononcés dans les JT français. Les années passent, le conflit politique continue éternellement de s’engrener, le Liban et sa capitale deviennent pour le narrateur un ailleurs dans le quotidien, un point de ralliement rêvé familial. Alors il faut garder le lien coûte que coûte, notamment à travers ces immenses groupes de discussion sur WhatsApp. Le Liban, c’est la famille désormais.
Sarah Jollien-Fardel – Sa préférée (Sabine Wespieser)
Dans ce village haut perché des montagnes valaisannes, tout se sait, et personne ne dit rien. Jeanne, la narratrice, apprend tôt à esquiver la brutalité perverse de son père. Si sa mère et sa sœur se résignent aux coups et à la déferlante des mots orduriers, elle lui tient tête. Un jour, pour une réponse péremptoire prononcée avec l’assurance de ses 8 ans, il la tabasse. Convaincue que le médecin du village, appelé à son chevet, va mettre fin au cauchemar, elle est sidérée par son silence. Dès lors, la haine de son père et le dégoût face à tant de lâcheté vont servir de viatique à Jeanne. À l’école normale d’instituteurs de Sion, elle vit cinq années de répit. Mais le suicide de sa sœur agit comme une insoutenable réplique de la violence fondatrice.
Pascale Robert-Diard, La Petite Menteuse (L’Iconoclaste)
À 15 ans, Lisa est une adolescente en vrac, à la spontanéité déroutante. Elle a eu des seins avant les autres filles. Des seins qui excitent les garçons. Mais Lisa change et devient sombre. Elle semble en permanence au bord des larmes. Acculée par ses professeurs, elle finit par avouer. Un homme a abusé d’elle, plusieurs fois. Les soupçons se portent sur Marco, un ouvrier venu faire des travaux chez ses parents. Marco n’a jamais été longtemps avec une femme. Il a essayé les hommes. Il boit trop. Il écrit des lettres rageuses pour sa défense, pleines de points d’exclamation. Sans hésitation, Marco est condamné à dix ans de prison. Lors du procès en appel, Lisa est majeure. Elle débarque dans le bureau d’Alice, une avocate de la petite ville de province. « Je préfère être défendue par une femme. » C’est comme cela que tout a commencé.
Goncourt des lycéens, 35e édition
Chaque année, ce prix permet à près de 2 000 lycéens choisis au sein d’une cinquantaine d’établissements d’élire leur lauréat. Celui-ci est issu d’une liste d’auteurs sélectionnés par l’Académie Goncourt. Une fois cette liste connue, la Fnac remet les ouvrages aux classes retenues (en section générale, technologique ou professionnelle). Les lycéens ont alors environ deux mois pour lire les romans, avec l’aide des enseignants. Pendant cette intense période de lecture, des rencontres régionales sont organisées entre auteurs et lycéens. Car l’opération ne se limite pas à l’attribution d’un prix : elle cherche à éveiller chez les lycéens un intérêt durable pour la littérature contemporaine, à stimuler leur jugement critique, et à confronter leur point de vue avec celui de leurs pairs sur une œuvre.
Le site de la Fnac
Les 15 romans sélectionnés
Les 15 romans sélectionnés pour le Goncourt des lycéens 2022 étaient :
Muriel Barbery, Une heure de ferveur (Actes Sud)
Grégoire Bouillier, Le cœur ne cède pas (Flammarion)
Nathan Devers, Les Liens artificiels (Albin Michel)
Giuliano da Empoli, Le Mage du Kremlin (Gallimard)
Carole Fives, Quelque chose à te dire (Gallimard)
Sabyl Ghoussoub, Beyrouth-sur-Seine (Stock)
Brigitte Giraud, Vivre vite (Flammarion)
Sarah Jollien-Fardel, Sa préférée (Sabine Wespieser)
Cloé Korman, Les Presque Sœurs (Seuil)
Makenzy Orcel, Une somme humaine (Rivages)
Yves Ravey, Taormine (Éditions de Minuit)
Pascale Robert-Diard, La Petite Menteuse (L’Iconoclaste)
Emmanuel Ruben, Les Méditerranéennes (Stock)
Monica Sabolo, La Vie clandestine (Gallimard)
Anne Serre, Notre si chère vieille dame auteur (Mercure de France)
Goncourt des lycéens : les lauréats précédents
2021 Clara Dupont-Monod, S’adapter (Stock)
2020 Djaïli Amadou Amal, Les Impatientes (Emmanuelle Collas)
2019 Karine Tuil, Les Choses humaines (Gallimard)
2018 David Diop, Frère d’âme (Seuil)
2017 Alice Zeniter, L’Art de perdre (Flammarion