Les nouveaux espions qui venaient de l’Est

 

Nous sommes pilonnés par la désinformation de la Russie de Vladimir Poutine.

Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères

Entre l’automne 2023 et l’été 2024, plusieurs actions étonnantes ont eu lieu dans les rues de Paris. Des centaines d’étoiles de David bleues sont taguées sur les murs de plusieurs arrondissements de la capitale. Des mains rouges peintes sur le mur des Justes au sein du Mémorial de la Shoah. Des cercueils vides déposés au pied de la tour Eiffel. Un piège tendu à tout un pays. Dans un contexte de montée de l’antisémitisme en France, de nombreuses personnes ne voient pas la manipulation derrière l’action.

Or, en octobre 2023, les autorités françaises ont arrêté un couple de Moldaves, surpris en train de peindre des étoiles juives : ils disent avoir été « envoyés par des commanditaires qui leur ont payé le voyage ». Le même scénario se reproduit quelques jours plus tard, mais cette fois avec succès, le couple s’enfuit. Il était aussi accompagné par un photographe. Les images des étoiles bleues de David sont immédiatement relayées sur les réseaux sociaux par des milliers de comptes, dont la plupart sont automatisés. Un écosystème numérique opaque et complexe. Qui se cache derrière ces opérations ?

Roman Dobrokhotov, journaliste et dissident russe, fondateur de The Insider, a eu accès à des documents émanant du SVR, le service de renseignement extérieur russe, attestant que « c’est quelque chose qui est considéré comme une politique pour le gouvernement russe ». Il y est stipulé clairement que « l’appel non pas à la raison mais aux émotions contribue à la réalisation la plus fiable des objectifs fixés à l’appareil de propagande ».Pour le député européen et journaliste Bernard Guetta : « Le Kremlin et ses services ont réussi leur coup… Regardez le malaise que cette affaire a créé dans l’opinion ! Tout cela a créé un climat malsain et anxiogène. »

L’objectif est juste de créer le chaos, une atmosphère de peur.

Roman Dobrokhotov, journaliste russe, The Insider

Quelles sont ces nouvelles méthodes utilisées par le Kremlin, les stratégies et les opérations déjà mises en œuvre, pour saper l’unité d’un allié de l’Ukraine, pour déstabiliser la France ? À partir de documents exclusifs et des récits de témoins clés, les équipes de La Fabrique du mensonge remontent la piste de ces agents qui œuvrent pour le Kremlin, parfois sans le savoir. Des agents dits « jetables ». Des amateurs, bon marché, faciles à remplacer et indétectables. « En fait, résume Andrei Curaracu, cofondateur du think tank Watch Dog, si la personne qui fait le travail ne sait pas pour qui elle travaille, c’est le meilleur moyen pour la Russie de prétendre à un déni plausible. »

Une enquête qui nous mène de Paris à Chisinau, en Moldavie, en passant par l’Estonie ou la Transnistrie, cette région moldave, très pauvre, le long de la frontière de l’Ukraine, sous occupation militaire russe depuis plus de trente ans. Où l’on découvre « le coordinateur des actions russes en Moldavie »selon Andrei Curaracu : un certain Ilan Shor, oligarque israélo-moldave à la tête d’une organisation criminelle, condamné par la justice moldave et aujourd’hui réfugié en Russie sous la protection de Poutine. « Les organisateurs, explique le journaliste Stefan Bejan (TV8), ce sont probablement les services secrets russes. » Qui opèrent jusqu’en Bosnie-Herzégovine où sont formés certains agents jetables dans des camps d’entraînement dirigés par d’anciens membres de la milice Wagner.

Depuis l’annonce par le président Macron en février 2024 d’envoi de troupes armées sur le sol ukrainien, la campagne de désinformation russe s’est intensifiée tout comme le recrutement de ces agents sur les réseaux sociaux tels que le russe Telegram. Nom de l’opération initiée par l’organe officiel de désinformation : Doppelgänger.

Une stratégie déjà enseignée pendant la période soviétique. Dans ce document d’archives filmé en 1983, l’agent repenti Youri Bezmenov s’exprime ainsi devant un parterre d’apprentis espions : « L’art suprême de la guerre consiste à ne pas se battre du tout mais à subvertir tout ce qui a de la valeur dans le pays de l’ennemi. Jusqu’à ce que la perception de la réalité de votre ennemi soit tellement perturbée qu’il ne vous perçoive plus comme un ennemi. » 

Cette guerre, elle est froide, elle est hybride, elle est totale.

Claude Malhuret, sénateur de l’Allier

Nouveauté : « La Fabrique du mensonge » disponible en podcast

La Fabrique du mensonge propose une sélection de ses documentaires les plus emblématiques en version podcast. Chaque semaine, un nouvel épisode propose à l’auditeur de plonger dans l’univers des fausses informations et de leur fabrication. Quelques semaines après leur diffusion sur France 5, les nouveaux numéros seront également disponibles en version audio.
Un podcast disponible sur les plateformes d’écoute Apple Podcasts, Spotify, Deezer, Castbox, Amazon Music et l’application Radio France.

La Fabrique du mensonge : Sur la piste des agents de Poutine

Cette collection documentaire explique comment naissent et se propagent les fausses informations, qui en sont les instigateurs et comment ont contre-attaqué ceux qui en ont été la cible.

Documentaire (80 min – 2025 – inédit) – Réalisation Elsa Guiol – Production Babel Doc et Together Media, avec la participation de France Télévisions 

Sur la piste des agents de Poutine est diffusé dans La Fabrique du mensonge dimanche 4 mai à 21.05 sur France 5
Disponible dès le vendredi 2 mai sur france.tv

Sur Lumni, La Fabrique du mensonge est disponible dans son intégralité.

Les master classes avec Lumni
Depuis le lancement de la collection en 2019, l’équipe de La Fabrique du mensonge part régulièrement à la rencontre des collégiens et des lycéens afin de les sensibiliser aux dangers de la désinformation et des fausses informations. Un rôle essentiel avec la multiplication des canaux et des sources d’informations et face à la rapidité de la propagation de l’information.

#Lafabriquedumensonge  

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