Il y a vingt ans disparaissait un comédien à part dans le cinéma français. France 3 lui rend hommage avec une soirée spéciale pour redécouvrir le talent unique et la sensibilité à fleur de peau de cet acteur inoubliable. Retrouvez-le dans l’un de ses rôles cultes, « La Soupe aux choux », suivi du documentaire inédit « Jacques Villeret, drôlement tragique ». À voir mardi 28 janvier à partir de 21.05 sur France 3 et sur france.tv.
21.05 - La Soupe aux choux
Le Glaude et le Bombé vivent dans un petit hameau. Le premier est veuf, le second célibataire. Ensemble, ils passent la plupart de leur temps à trinquer. Une nuit, un extraterrestre atterrit dans le champ du Glaude. Il ne semble pas agressif. Le Bombé est réveillé, lui aussi, par la lumière émise par la soucoupe, mais l'extraterrestre, que le Glaude surnommera « La Denrée », le paralyse sur place. La Denrée découvre la soupe aux choux qui mijote chez le Glaude. Ce dernier lui en donne à emporter. Le lendemain, le Bombé s'empresse d'aller raconter au village ce qu'il a vu. Mais, bien entendu, personne ne le croit...
C’est fou, cette dualité entre ce personnage qui semblait si nature, candide, tout simplement drôle, et les tourments qui étaient les siens.
Patrice Leconte, réalisateur
22.45 - Jacques Villeret, drôlement tragique (inédit)
Sélectionné au Festival Lumière 2024
Il faut voir ce long plan-séquence autour de Jacques Villeret, incarnant Le Batteur du Boléro dans le court-métrage homonyme du réalisateur Patrice Leconte. Tandis que la caméra tourne autour de lui, sur le thème musical très répétitif, le visage mobile et sobre du comédien incarne tour à tour l’ennui, le détachement, l’agacement, l'introspection, la complicité : il nous émeut et nous fait tellement rire… Pourtant, ce comédien qui savait toucher en plein cœur son public cachait ses blessures : « C’était une lutte acharnée du malheur contre le bonheur », raconte son ami Jean-Michel Ribes.
Jacques Villeret est mort le 28 janvier 2005 à l’âge de 53 ans. « Mais on peut dire qu’il est mort à 106 ans. Parce que ce qu’il a vécu la nuit et ce qu’il a vécu le jour, ça fait deux vies ! » Le comédien aimait l’ivresse de la nuit, et son alcoolisme était notoire.
Chez Jacques, le seul territoire de liberté et d’émotion sans souffrance, c’était celui de l’acteur.
Jacques Weber, comédien et ami
Le métier d’acteur, Jacques Villeret en a rêvé dès l'enfance en Touraine, « idyllique », avec ses parents et sa sœur Ghislaine – qui témoigne dans ce documentaire. Doué pour déclencher le rire, il est inspiré par Jacques Brel : « Il fait partie des gens qui m’ont donné une envie féroce de tenter ma chance. »
Dès son arrivée à Paris à l’âge de dix-neuf ans, il entre au Conservatoire où il rencontre André Dussollier, Nathalie Baye et Jacques Weber avec qui il forme une bande d'amis. Chez l'élève de Louis Seigner, le talent semble évident. Il sortira avec un deuxième Prix de comédie : « Il était au-dessus du lot, il avait du génie », se souvient Weber avec une profonde tendresse. Yves Boisset lui offre sa première chance au cinéma, qui lui vaut d'autres rôles, dont plusieurs avec Claude Lelouch : « Il avait tout ce qu’on attend d’un acteur : la folie, l’innocence, la timidité. » Son rôle dans Robert et Robert, son cinquième film pour le réalisateur avec Charles Denner, lui vaut son premier César du Meilleur second rôle. « Il était extrêmement timide, mais dès qu’il était en scène, il avait tous les culots », se souvient Philippe Ferran qui a mis en scène la plupart de ses spectacles.
À moins de trente ans, son nom trône seul en haut de l'affiche pour le film de Jean-Michel Ribes, Rien ne va plus, où il incarne onze personnages. Le metteur en scène, un intime de Villeret, connaît aussi ce qu'il tait, par pudeur. Car le comédien porte un secret : à quinze ans, il a découvert que son père ne l'était pas. « Ça a été un choc et ça l’a bouleversé, raconte le comédien Daniel Russo, son confident. Il n’a pas compris. »
À travers tout ce qu’il joue, on vient voir quelqu’un qui transmet exceptionnellement l’humanité.
Jean-Michel Ribes, metteur en scène et ami
À 40 ans, il tente de retrouver son père... une expérience douloureuse. L'alcoolisme ne le quitte pas, s'invite parfois sur les tournages et « quand il était ivre, précise Philippe Ferran, il devenait l’envers exactement de ce qu’il était à jeun ».
Parfois, il ne boit pas du tout, comme lorsqu'il interprète le personnage de François Pignon – sous le regard encore admiratif de Thierry Lhermitte – dans Un dîner de cons qui attirera dix millions de spectateurs. Mais il s'enfonce quand la vie lui fait trop mal, comme ce jour où il apprend qu'il ne jouera pas le rôle d'Ugolin dans Jean de Florette. Claude Berri a cédé à la pression d'Yves Montand qui n'en voulait pas : il redoutait qu'il ne lui fasse de l'ombre comme cela a été le cas dans le film Garçon... « Il a encaissé, raconte Jean-Michel Ribes. Ça nourrissait son malheur, mais il ne le montrait pas. »
Ce documentaire révèle ce qu'il en coûte d'être un si grand artiste, même avec une étiquette de « second rôle » accrochée au revers de son costume de comédien. En découvrant son histoire méconnue, pleine de rebondissements et d’événements parfois dramatiques, on comprend comment cet homme qui a pu s'installer aussi haut sans être une « icône », occupe une place à part, auréolé d'une lumière particulière, en restant du côté « des nôtres » sans jamais se défaire de sa fragilité.
Soirée spéciale Jacques Villeret
La Soupe aux choux / Jacques Villeret, drôlement tragique
La Soupe aux choux
Long-métrage (98 min - 1981) – Réalisation Jean Girault – Scénario Louis de Funès et Jean Halain – Production Les Films Christian Fechner
Avec Louis de Funès, Jacques Villeret, Jean Carmet, Claude Gensac...
Jacques Villeret, drôlement tragique
Documentaire (60 min - 2024) - Auteur-réalisateur Christophe Duchiron - Sur une idée originale de Gilles Berthaut - Production Les Bons Clients
LaSoirée spéciale Jacques Villeret est diffusée mardi 28 janvier à partir de 21.05 sur France 3
À revoir sur france.tv