Après avoir débuté sa transition de fille à garçon à l’adolescence, Emma, aujourd’hui âgée de 20 ans, revient à son genre de naissance. À travers son chemin sinueux, la réalisatrice Marion Vaqué-Marti nous livre un éclairage nuancé sur un sujet sociétal sensible, sans pour autant remettre en question les avancées majeures dans l’expression de la transidentité. « Jeunesse en (re)transition, trouver sa voie » : un documentaire à découvrir mardi 29 octobre à 22.35 sur France 2.
« Je m’appelle Emma. J’ai 20 ans. Je suis née fille. C’est à 14 ans que je prends la décision de faire ma transition de genre, c’est-à-dire devenir un garçon. »
Ce film documentaire de Marion Vaqué-Marti retrace le parcours d’un.e adolescent.e en quête de soi. Soutenue par ses parents et le corps médical, Emma débute sa transition par la prise d’hormones. Engagée dans la voie de la transition, elle décide d’aller plus loin en pratiquant une mastectomie à l’âge de 16 ans. « On a l’impression que l’on est sur des rails et qu’il n’y a qu’une seule destination », explique sa maman. « On a tous dit oui à cette urgence et enclenché des étapes assez rapidement. En l’espace de deux ans, on est allé à la table d’opération. »
Mais deux ans après sa mastectomie, Emma sombre dans la dépression et accepte de se dire qu’elle est allée trop loin. Aujourd’hui, elle poursuit sa quête : devenir soi-même. En revenant à son genre de naissance, Emma tente de trouver sa propre voie, de tracer son itinéraire en empruntant le chemin inverse. « Alors qu’une plus grande visibilité est donnée à la transidentité, alors que les conditions de changement d’état civil sont assouplies, je découvre que depuis 2020 les unités françaises dédiées aux jeunes sont saturées, explique la réalisatrice. Parallèlement, je constate que dans les pays pionniers en matière de transition des mineur.e.s, des jeunes adultes ayant changé de genre à l’adolescence reprennent le chemin inverse. En Angleterre, certains ont même saisi la justice, contraignant la seule clinique dédiée à la transition des mineur.e.s à fermer ses portes. De leur côté, la Suède et la Finlande ont restreint l’accès aux traitements médicaux pour les moins de 18 ans. »
Depuis 2022, l’Académie de médecine alerte sur les effets secondaires de l’hormonothérapie : impact sur la croissance, fragilité osseuse, risque de stérilité, conséquences émotionnelles et intellectuelles. Un autre risque se profile également : celui de prescrire trop vite et de surestimer le diagnostic, comme en atteste le nombre croissant de jeunes adultes souhaitant, comme Emma, détransitionner.
Sans jamais remettre en question les avancées politiques et sociales permettant aux jeunes d’exprimer leur transidentité et de pouvoir bénéficier d’un accompagnement médical, le documentaire tente d’éclairer le parcours d’Emma. La réalisatrice installe alors ses caméras dans un service hospitalier différent de celui où elle a été suivie. Au CHRU de Lille, Lino, Emilio et Orion font partie des 400 jeunes patients transgenres du Pr François Medjkane pour qui l’accompagnement s’appuie d’abord sur « la conviction d’une personne du sentiment d’appartenir à un genre ou à un autre ». Un sentiment intime, fondement d’un protocole dit transaffirmatif mis au point au Pays-Bas il y a trente ans et destiné à mettre en place le meilleur accompagnement possible pour les mineurs. En France, il est appliqué depuis 2013 dans des unités spécialisées. Comment accompagner au mieux ces adolescent.e.s souvent en souffrance ? Au fil des consultations et des groupes de parole avec les parents, comment évaluer la balance bénéfice-risque des traitements ? Pourquoi les pouvoirs publics n’investissent-ils pas dans la recherche dont les enseignements permettraient de mieux répondre à cette demande en augmentation ? « C’est pour moi une chance de pouvoir faire cohabiter dans ce film le témoignage d’Emma et l’expérience de ce médecin, explique Marion Vaqué-Marti. Leur souhait est de faire entendre une jeunesse qui rebat les cartes des normes de genre. Le mien est que le sujet complexe de la transition médicale des mineur.e.s cesse de polariser la société et qu’il trouve enfin sa place dans un débat public nuancé et apaisé… »
Se sentir fille ou garçon. Parfois les deux à la fois. Ou ni l’un ni l’autre. Aujourd’hui, le genre s’exprime de façon multiple et de nombreuses personnes, comme Emma, tentent d’exprimer leur propre voie. Alors que la Haute Autorité de santé a été saisie et devrait rendre ses recommandations en 2025, Emma, qui partage ici, sans militantisme et avec sincérité, son histoire et son expérience, conseille juste de « mettre un peu de patience là-dedans ». D’autant plus que, selon elle, une détransition est plus dure à assumer qu’une transition car « cela revient à dire que l’on a fait une erreur ».
Infrarouge : Jeunesse en (re)transition, trouver sa voie
Emma est née fille. À l’image de plus en plus d’adolescent.e.s, elle a souhaité transitionner, c’est-à-dire changer de genre. À 14 ans, soutenue par ses parents, elle est prise en charge dans une unité hospitalière dédiée à la transidentité des enfants, adolescents et jeunes adultes. À 15 ans, elle démarre un traitement hormonal. À la veille de ses 17 ans, elle bénéficie d’une double mastectomie. Mais, deux ans plus tard, Emma devenue Nathan se rend à l’évidence que sa transition n’allège pas son mal-être. Aujourd’hui âgée de 20 ans, Emma revient à son genre de naissance en inventant sa propre voie. Sans remettre en question l’avancée politique majeure que représente le droit de vivre en accord avec son identité de genre, ce film se penche sur la demande croissante de transition des mineur.e.s et sa prise en charge médicale. À l’heure où des pays pionniers en matière de transition de genre chez les mineur.e.s infléchissent leur politique de prise en charge, ce film tente d’apporter un éclairage nuancé sur un sujet aussi sensible que complexe qui polarise la société.
Documentaire (62 min – 2024) — Réalisation Marion Vaqué-Marti — Production
Capa Presse, avec la participation de France Télévisions
Diffusion le mardi 29 octobre à 22.35 sur France 2
À voir et à revoir sur france.tv