Soirée spéciale : « Emprise numérique, 5 femmes contre les Big 5 »
Les réseaux sociaux tuent
France 5
Documentaire
Accusés de ne pas protéger les enfants des violences en ligne, les géants de la tech sont sommés de s’expliquer. Pour la première fois de l’histoire, des États et des parents désemparés s’engagent dans une lutte pour que leur responsabilité soit reconnue. Parmi eux, cinq femmes ont choisi de bouleverser leur quotidien en créant un mouvement pour changer le destin des générations futures. Un documentaire suivi d’un débat à voir mardi 10 décembre à 21.05 sur France 5 et sur france.tv.
Vous avez du sang sur les mains. Vous avez créé un produit qui tue des gens.
Lindsey Graham, sénateur républicain
« Chers Big 5, vous ne me faites plus peur car je vous ai survécu. Il m’a fallu du temps et de la force pour me sortir de cette addiction. Aujourd’hui, j’ai le courage de vous affronter. Dans quelques heures, je serai devant vous. Me verrez-vous ? Je ne viendrai pas seule. Je représente des millions d’enfants à travers le monde à qui vous faites du mal. Dans cette lettre, je vais vous raconter mon histoire. » Alexis, 20 ans, victime des réseaux sociaux
Le 31 janvier 2024, les dirigeants des cinq plus grands médias sociaux – Facebook et Instagram (Meta), TikTok, Snapchat, X et Discord – sont auditionnés par le Sénat américain. Dans le public, les nombreuses familles dont un enfant s’est suicidé. Meta est poursuivi par 41 États américains.
« Ce fut un moment historique. » Kathleen est la mère d’Alexis, qui a aujourd’hui 21 ans. Adolescente, elle reçoit son premier téléphone à l’âge de 11 ans et s’inscrit sur Instagram. « Petite fille très joyeuse », elle bascule alors rapidement dans l’anorexie puis les scarifications. « À ce moment-là, témoigne sa mère, personne du milieu médical ne savait que l’addiction et les problèmes de santé mentale de ma fille provenaient des réseaux sociaux. » Alexis se souvient : « Je me sentais vulnérable… j’étais vraiment mal. Je pense vraiment qu’Instagram a une grande part de responsabilité dans les problèmes de santé mentale dont j’ai souffert. » À 13 ans, elle tente de mettre fin à ses jours.
Avec sa mère et un millier de familles, elle porte plainte contre les Big 5 et les accuse d’avoir sacrifié son enfance pour leur profit. Elle utilise sa plume pour se faire entendre.
Avec sa mère, Kathleen, elles font partie des premières à avoir attaqué Meta, l’accusant de « non-assistance à enfant en danger » et de « provocation au suicide ». Alexis et Kathleen ont rejoint un collectif américain qui compte aujourd’hui 1 200 familles. Une première mondiale.
Si pour vous Instagram ne nuit pas aux jeunes, vous ne devriez pas en être à la tête. Car c’est le cas.
Un sénateur américain à Mark Zuckerberg
Elisabet est maman de trois enfants. Depuis son village catalan, elle a levé une armée de parents en quelques jours. Tout est parti d’une conversation entre copines avec l’idée de partager leurs inquiétudes sur l’emprise numérique. Aujourd’hui, ils sont trente mille parents qui ont pour but d’obliger les autorités à interdire les smartphones aux moins de 16 ans. « Nous sommes des milliers de pères et de mères qui pensons que les smartphones et les réseaux sociaux ne sont pas bons pour nos fils et nos filles. »
Laure est avocate. Elle défend les parents démunis face aux réseaux sociaux. Elle a déposé la toute première plainte en France contre TikTok et le tout premier recours collectif au monde dénonçant la responsabilité de cette plateforme dans le suicide d’une adolescente, Marie. « Beaucoup d’adolescents peuvent se retrouver dans son histoire, et beaucoup de parents dans l’histoire des parents de Marie. » Pour faire changer les lois qui protègent les Big 5, Laure doit rallier d’autres victimes à sa cause. « Elle cachait le fait qu’elle allait mal » mais parlait de suicide dans ses vidéos. « Ces vidéos n’ont pas été censurées. On a démarré de là : c’est le premier constat qu’on a fait. »
Socheata s’est engagée dans la lutte depuis que son fils a été manipulé par un prédateur sur Internet. Elle a rejoint une association et travaille avec les policiers pour traquer les pédocriminels. Leur constat est alarmant. Les réseaux sociaux ont laissé les contenus pédopornographiques s’échanger en masse et à la vue des enfants. Le nombre de pédocriminels s’est ainsi multiplié et ils seraient de plus en plus jeunes. « On n’imagine pas l’intelligence, la perversité et la créativité de ces personnes. »
Les adultes n’ont pas conscience de ce que leurs enfants regardent.
Kathleen, mère d’Alexis
Elisa Jadot, la réalisatrice du film, se livre à une expérience : elle crée un avatar, Lili, 13 ans, passionnée de cheval, avec une photo créée par l’IA. En quelques jours, elle va découvrir comment « les algorithmes choisissent pour moi les contenus que je vais regarder… Ce que me proposent les plateformes devient de plus en plus sombre ».
En 2021, la lanceuse d’alerte Frances Haugen, ingénieure et ancienne employée de Facebook, a divulgué 20 000 documents internes. Beaucoup d’entre eux montrent comment, depuis presque vingt ans, l’entreprise étudie le développement cérébral des plus jeunes pour en faire leurs nouveaux utilisateurs. « Les enfants sont une cible prioritaire pour Instagram, précise un document interne. Les attirer et les fidéliser reste une priorité. Il est essentiel d’en toucher un maximum pour conserver notre place. »
Chez Meta, une correspondance interne révèle cette note d’un salarié : « Les suggestions d’amis augmentent de 75 % les contacts inappropriés entre adultes et mineurs. Pourquoi n’avons-nous pas désactivé cette fonctionnalité ? »
Lors de l’audition des dirigeants des Big 5, Mark Zuckerberg s’est vu contraint de s’excuser auprès des familles présentes : « Je suis désolé pour ce que vous avez vécu. »
Des projets de loi ont été proposés pour obliger les plateformes à réguler leurs contenus et supprimer leur immunité garantie par un vieil article de loi. Mais les géants de la techno avec leurs services juridiques continuent d’œuvrer en coulisses et investissent des millions de dollars pour un lobbying intensif afin de ne pas assumer cette responsabilité…
D’une simple pression du doigt, ce smartphone censé vous divertir et vous informer devient un objet qui empoisonne et détruit la vie de nos enfants. Vos algorithmes soigneusement élaborés ont bien plus d’influence sur la vie de nos enfants que les parents les plus attentionnés.
Un sénateur américain
Soirée spéciale
Emprise numérique, 5 femmes contre les Big 5
Ce documentaire fait l’objet d’une soirée spéciale avec la diffusion du magazine C ce soir présenté par Karim Rissouli qui poursuit le débat posé par le film.
Documentaire (80 min – 2024 – inédit) – Un film d’Elisa Jadot – Production Babel Doc et Together Media, avec la participation de France Télévisions
Emprise numérique, 5 femmes contre les Big 5 est diffusé mardi 10 décembre à 21.05 sur France 5
À (re)voir sur france.tv
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