Collection « Crimes contre l’humanité : Le procès de Klaus Barbie »

Le « boucher de Lyon » face à ses crimes

France 2

Documentaire

Avant de revenir sur les cas Paul Touvier et Maurice Papon, Gabriel Le Bomin nous plonge dans les archives filmées du procès de Klaus Barbie, ancien chef de la Gestapo, premier dignitaire nazi jugé en France pour crime contre l’humanité en 1987. Un documentaire qui fera date pour un événement qui a fait date, participant à la construction de notre mémoire collective et marquant une étape clé contre l’impunité des criminels de guerre. Mardi 8 avril à 21.10 sur France 2.

P. Touvier, K. Barbie et M. Papon - Collection « Crimes contre l'humanité » © Dana Productions / Mediawan

11 mai 1987. Un homme de 74 ans est jugé par la cour d’assises du Rhône dans la salle des pas perdus du palais de justice de Lyon. Il se présente sous le nom de Klaus Altmann. « Ce n’est pas un monstre qui est entré dans le box des accusés, se rappelle pour ce documentaire historique l’écrivain Sorj Chalandon, mais un homme. » Un homme, donc, en fuite depuis quarante ans en Amérique du Sud, finalement extradé de Bolivie en 1983 grâce à la traque patiente, déterminée et acharnée des avocats Beate et Serge Klarsfeld. Un homme, qui n’est autre que Klaus Barbie, ancien chef de la Gestapo, surnommé le « boucher de Lyon », responsable entre autres des rafles de la rue Sainte-Catherine, de la rafle des enfants d’Izieu et du dernier convoi de déportés du 11 août 1944. Sorj Chalandon, qui couvre alors le procès pour Libération, conclut : « C’est plus terrifiant encore de penser que c’est un homme. » 

C’est un homme ordinaire, terriblement ordinaire. Ce sont des gens qui n’auraient jamais dû accéder à ce niveau de responsabilité, qui vont devenir quelqu’un grâce à la guerre.

Alain Jakubowicz, avocat des parties civiles - « Le procès de Klaus Barbie »

C’est la première fois que la justice française instruit un procès pour crime contre l’humanité. L’événement est à la fois historique, juridique, médiatique et sociologique. Quatre ans d’instruction, 113 associations et particuliers constitués partie civile, représentés par 40 avocats, 900 journalistes accrédités et des dizaines de caméras autorisées exceptionnellement à filmer (à l’instigation du garde des sceaux Robert Badinter) pour garder la mémoire des 37 audiences (un total de 145 heures d’archives, ouvertes au public depuis 2017).  
Il y a eu, certes, dans l’immédiate Libération, les procès Pétain (condamné à la prison à vie et à l’indignité nationale) ou Laval (condamné à mort), ainsi que celui de Bousquet en 1949 (qui sera acquitté), mais, en cette fin des années 1980, quarante ans après l’occupation nazie et la collaboration engagée par l’État dirigé par le maréchal Pétain, la France n’a encore jamais osé affronter aussi directement son passé. « Dans les Trente Glorieuses, on n’avait pas envie de voir ces squelettes ambulants, d’avoir le récit des morts et des souffrances », analyse Alain Jakubowicz, avocat des parties civiles. Là, devant les yeux du monde, les exactions, les arrestations arbitraires, les rafles, les tortures, les déportations, les camps… tout est raconté, dans un silence aussi respectueux que glaçant, par celles et ceux qui les ont subis et qui en sont revenu(e)s. Le récit intime de leur calvaire devient une parole publique qui, tout à la fois, éclaire les zones sombres du passé et libère le refoulé de ces années noires, mais donne également du champ aux premières théories négationnistes (portées notamment par le militant Robert Faurisson et des manifestants du Front national perturbant le procès). 
Le procès Barbie est donc, au-delà du jugement de l’homme et de ses actes, un moment cathartique pour notre société, une étape majeure dans la construction de la mémoire collective de notre pays et certainement aussi dans la consolidation de la mémoire de la Shoah. 

Je crois que [Klaus Barbie] ne pensait jamais à ses victimes. Comme la plupart de criminels qui ont agi au nom de l’État, c’est très facile de se débarrasser de ses crimes.

Serge Klarsfeld, avocat - « Le procès de Klaus Barbie »

Suivant la chronologie du procès en trois épisodes limpides et percutants (« L’Accusé », « Les Témoins », « Le Jugement »), ce premier documentaire de la collection « Crimes contre lhumanité » mêle interviews (avocats, journalistes, historiens) et images darchives saisissantes (restaurées par lINA). Gabriel Le Bomin, dont les fictions (Les Fragments d’Antonin, De Gaulle) et les documentaires pour France Télévisions (Guerre d’Algérie, la déchirure, Collaborations, La Rafle des notables) témoignent de la nécessité dun regard digne et sans concession sur notre passé, réussit à nous immerger dans le présent de lhistoire. Semparant des archives comme dune matière vivante et contemporaine, reprenant in extenso certaines audiences parmi les plus bouleversantes, ne refusant ni l’émotion ni l’indignation, son film entre dans la vérité humaine du procès. Nous sommes avec le public, avec les avocats, avec les jurés et, même, avec l’accusé, « homme seul défendu par un homme seul », selon les effets de manche de son conseil, le tout jeune Jacques Vergès, qui, initiant là sa fameuse « défense de rupture », permit à Klaus Barbie de ne pas assister aux dépositions de ses victimes. Une plongée vertigineuse au cœur de la banalité du mal. 

Collection Crimes contre l’humanité : Le procès de Klaus Barbie

Klaus Barbie
Klaus Barbie durant son procès.
© Dana Productions / Mediawan

Le 11 mai 1987 s’ouvre à Lyon le procès de Klaus Barbie, ancien chef de la Gestapo, premier officier nazi jugé en France pour crime contre l’humanité. Traqué et confondu par Beate et Serge Klarsfeld, il est extradé de Bolivie grâce à des accords entre gouvernements. L’accusation porte sur trois crimes majeurs : les rafles de la rue Sainte-Catherine, la rafle des enfants d’Izieu et le dernier convoi de déportés du 11 août 1944. Durant 37 audiences, filmées en intégralité, les témoignages des survivants révèlent un tortionnaire implacable et cruel. Barbie, absent sur les conseils de son avocat Jacques Vergès, est condamné le 4 juillet 1987 à la réclusion à perpétuité. Ce verdict marque une étape clé contre l’impunité des criminels nazis. Barbie décède en 1991.

Documentaire (inédit – 3 x 52 min – 2025) – Un film de Gabriel Le Bomin – Production Dana Productions / Dana Hastier, une société Mediawan – Coproduction INA avec le soutien de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah – Avec la participation de France Télévisions

Intervenants : Robert Badinter, homme politique et avocat ; Henry Rousso, historien ; Alain Jakubowicz, avocat ; Jean-Claude Bauer, journaliste ; Jean-Olivier Viout, magistrat ; Denis Eyraud, architecte ; Caroline Laudrin, journaliste ; Serge et Beate Klarsfeld, avocats ; Noëlle Herrenschmidt, journaliste ; Pierrette Assouline-Abecassis, avocate ; Christian Van Ryswyck, réalisateur ; Claude Sérillon, journaliste ; Emmanuel Poncet, journaliste ; Gisèle Alalof, avocate ; Daniel Borgeot, réalisateur du procès ; Sylvia Zimmermann, avocate ; Annette Wievorka, historien ; Christian Charrière-Bournazel, avocat ; Alain Finkielkraut, philosophe et écrivain ; Sorj Chalandon, journaliste ; Richard Zelmati, avocat ; Laurent Joly, historien

La collection « Crimes contre l’humanité » revient sur la décennie 1987-1998, durant laquelle la justice française a instruit le procès de trois hommes ayant, chacun à leur niveau, contribué à la mise en place et à la réalisation d’une politique d’arrestation, de torture et de déportation de juifs et de résistants en France entre 1940 et 1944 : Klaus Barbie, le nazi, Paul Touvier, le milicien, et Maurice Papon, le haut fonctionnaire.
Durant toutes ces années, ils ont changé d’identité (Barbie), ont été protégés par de puissants réseaux (Touvier) ou ont brillamment réintégré la société jusqu’au plus haut niveau de la République (Papon).
Se pensant tirés d’affaire, spéculant sur l’oubli et son allié précieux, le temps, ils ont été surpris, à l’âge de la vieillesse, au moment où l’on se retire des affaires du monde, par la résurgence de ce passé caché, le retour des fantômes qui réclament justice, la vivacité douloureuse de la parole des victimes et la mise en lumière publique de leur responsabilité pleine et entière. Pour eux, l’heure des comptes a sonné au terme d’années de traques et de procédures.
Le temps des procès pour Crime contre l’humanité est enfin arrivé.
Ce sont ces trois grands moments d’Histoire et de justice que raconte cette collection, en plongeant dans la matière première de ces procès : la captation audiovisuelle que la loi Badinter de 1985 a permis de réaliser.

Prochainement 
Le procès de Maurice Papon
Documentaire (3 x 52 min) – Scénario Gabriel Le Bomin et Valérie Ranson Enguiale – Réalisation Gabriel Le Bomin

Le procès de Paul Touvier  
Documentaire (2 x 52 min) – Scénario Valérie Ranson Enguiale, Antoine de Meaux et Gabriel Le Bomin – Réalisation Antoine de Meaux

Collection « Crimes contre l’humanité : Le procès de Klaus Barbie », diffusé mardi 8 avril à 21.10 sur France 2, est à (re)voir sur france.tv

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