Des mécènes révolutionnaires : « Les Noailles, une vie pour l’art »
Que serait l’art du XXe siècle sans Charles et Marie-Laure de Noailles ? Ce couple de mécènes aussi généreux que visionnaire a consacré sa vie à soutenir la création contemporaine, bousculant au passage tous les codes de la haute société. Ils ont découvert et soutenu les plus grands artistes, quitte parfois à se brûler les ailes. Ce film raconte leur histoire depuis leur mariage au cœur des Années folles, entre Paris et la Côte d’Azur. À voir vendredi 23 juin à 22.40 sur France 5.
De Salvador Dalí à Luis Buñuel, d’André Breton à Alberto Giacometti, de Jean Cocteau à Pierre Clémenti, les Noailles ont découvert et soutenu les plus grands artistes en inventant une nouvelle forme de mécénat. Malgré les scandales et les censures, Charles et Marie-Laure de Noailles ont écrit l’une des plus belles pages de l’histoire de l’art, laissant derrière eux des chefs-d’œuvre intemporels.
Pétards, fumigènes, hurlements… Ce 3 décembre 1930, le cinéma de la rue Tholozé à Paris est dévasté et les spectateurs hurlent au scandale ! La première projection publique du film de Luis Buñuel L’Âge d’or a divisé et choqué, et dès le lendemain toute la presse s’en empare. Le film – jugé subversif, absurde et immoral – est interdit et sera censuré pendant plus de cinquante ans. Pour Charles et Marie-Laure de Noailles, qui ont financé et soutenu le film, l’événement marque une rupture : on les pointe du doigt et ils sont bannis de la haute société.
Depuis leur mariage au début des années 1920, le couple de mécènes soutient les artistes d’avant-garde, en utilisant leur argent, leur notoriété et leur flair. Et surtout répond à « l’envie impérieuse de s’amuser avec des gens intelligents ». Leur villa à Hyères – un exemple précurseur d’architecture moderne, dessiné par le décorateur de cinéma Robert Mallet-Stevens – accueille toute la scène intellectuelle et artistique de l’entre-deux-guerres.
L’amour de l’art et la soif de liberté ont réuni le vicomte Charles de Noailles et Marie-Laure née Bischoffsheim. L’unique héritière d’une famille de banquiers garde le souvenir ébloui, à 16 ans, de sa rencontre avec Jean Cocteau, venu se réfugier dans la demeure familiale : « Il était le premier être non enchaîné qui passait par mon chemin. »
À une époque où les artistes vivent souvent dans la misère, le mécénat inédit et sans équivalence du couple assure à ceux qu’ils mettent en lumière une visibilité et une reconnaissance. Mus exclusivement par le désir et la volonté de soutenir la création contemporaine, les Noailles constitueront au fil des années une collection unique au monde, en s’intéressant à l’avant-garde de tous les arts.
Ce documentaire déroule les moments phares de cette vie de passion et d’engagement, où tiendront une grande place les amitiés profondes avec les uns et les autres. De nombreuses images d’archives dévoilent les moments de vie privée dans la villa du Sud, en compagnie des surréalistes. Le film s’appuie également sur les carnets de Marie-Laure, où, pendant quarante ans, elle rassemblera articles, réflexions et créations de ses amis artistes.
Le scandale du film de Buñuel, inspiré des 120 jours de Sodome du Marquis de Sade, dont elle est la descendante directe, signe un tournant dans leur vie de mécènes. Mais jusqu’à leur mort ils incarneront l’esprit d’anticonformisme et de liberté.
Aux arts et cætera : Les Noailles, une vie pour l’art
Dotés de personnalités très différentes, Charles et Marie-Laure de Noailles étaient animés par une passion commune pour l’avant-garde artistique. Peinture, sculpture, cinéma, musique ou même ethnologie, ils sont allés chercher le talent partout où il se trouvait, ne se fiant qu’à leurs intuitions et leurs désirs, créant des liens forts avec ces créateurs qui les fascinaient…
Documentaire (52 min – 2022 – inédit) – Auteure-réalisatrice Gaëlle Royer, avec la collaboration de Stéphane Boudin-Lestienne et Alexandre Mare – Commentaire Emma de Caunes – Production Program 33, avec la participation de France Télévisions
Diffusion vendredi 23 juin à 22.40 sur France 5 dans Aux arts et cætera
À voir et revoir sur france.tv