Pour le premier numéro d’« Ils font rayonner la France », place au savoir-faire alsacien

Lorsque maman m’a vue commencer à faire des confitures, elle m’a dit : « Ah non, non, non. Ici, au village, tout le monde a son verger, son jardin. Ils font chacun leurs confitures et on ne vendra jamais, jamais tes confitures. » Alors, je lui ai promis de n’en faire qu’une fois. Aux premiers clients qui voulaient acheter la confiture, elle a refusé de la leur vendre en disant : « C’est de la déco. » Au sixième client, elle a quand même réfléchi. Elle est venue me voir, elle a dit : « Tu sais, on devrait peut-être quand même les vendre. »

Christine Ferber

On mériterait tous d’être aussi passionnés par notre métier qu’ils le sont. Ressentir la même fierté face au travail accompli. Et se dire, chaque matin en se levant, qu’on a choisi le bon chemin. Combien d’entre nous peuvent s’en prévaloir ? Après tout, nous passons la majeure partie de notre vie à travailler. Il serait donc tout à fait logique que cette période incontournable soit teintée de plaisir. 
Eux, en tout cas, peuvent en témoigner. N’allez pas croire pour autant que leur parcours n’ait pas été semé d’embûches ou qu’il ressemble à une autoroute. On pourrait même ajouter, en les regardant travailler, qu’ils ne se reposent ni sur leurs lauriers ni sur leur renommée. Ils continuent de parfaire leur savoir-faire ou de chercher de nouvelles idées. Pour ces artisans, chaque geste compte. On les devine méticuleux, attentifs ou studieux. À travers leur portrait, c’est tout un art qui s’exprime. Celui de l’excellence. À travers leur réussite, leur présence à l’international, c’est tout un monde qui est célébré. Celui des travailleurs manuels. 
Les études manuelles ont souvent été reléguées au second plan, dénigrées. Ce documentaire mériterait d’être montré à tous les élèves de troisième qui hésitent entre la filière classique et la filière pro, ou à ceux qui se voient imposer la filière pro par défaut.

Quand on a des artisans comme ça, qui ont un tel niveau de savoir-faire, c’est un peu les meilleurs ambassadeurs qu’on a dans des régions comme Chicago. Donc, on est ravis quand on peut s’appuyer et collaborer, et rencontrer des personnalités comme Pierre.

Yannick Tagand, consul général de France à Chicago lors de la fête alsacienne organisée par Pierre Zimmermann

Portraits croisés

Grâce à ses confitures, Christine Ferber est devenue une véritable star au Japon. Dans son atelier de Niedermorschwihr près de Colmar, toute la production est réalisée à la main, ce qui permet d’en conserver toute la saveur. Nous avons suivi Christine dans la confection d’un nouveau nectar pour la fête des mères au Japon et d’une recette inédite pour le chef pâtissier Pierre Hermé…

Christian Deichtmann est ébéniste d’art. Dans son atelier de Mundolsheim au nord de Strasbourg, il réalise des meubles qui sont d’authentiques chefs-d’œuvre. Il travaille régulièrement pour les Monuments historiques mais crée également du mobilier contemporain très prisé de la clientèle étrangère. Son nouveau défi : concevoir avec son fils, Benjamin, une magnifique bibliothèque de style Louis XV qui prendra place dans la bibliothèque des Dominicains à Colmar. 

Pierre Zimmermann confectionne l’un des meilleurs pains de Chicago. Avec sa femme Michèle et ses deux fils, ce champion du monde de la boulangerie a quitté son Alsace natale il y a une douzaine d’années pour se lancer dans un pari totalement fou : séduire les Américains avec son pain artisanal au goût unique. Son nouveau pari ? Organiser une grande fête pour mettre à l’honneur l’Alsace.

Il est l’un des derniers fondeurs de cloches en France et le seul dans le Grand Est. Julien Calcatera en fabrique pour les églises du monde entier. Il supervise toutes les étapes qui permettent de donner naissance à un instrument à chaque fois unique. Dans quelques mois, Julien et son équipe doivent livrer une cloche majestueuse dans une paroisse allemande. Un nouveau challenge pour ce passionné.

Cyril Bordage travaille pour l’une des cristalleries les plus prestigieuses de France, la maison Lalique. Ce maître verrier passionné par son art depuis son enfance va participer à la création d’une collection d’objets exceptionnelle. Pour son centième anniversaire, la manufacture Lalique a décidé de produire une dizaine de ses pièces iconiques dans une couleur inédite. Mais ce n’est pas le seul défi que Cyril devra relever. Il a décidé de participer au concours de Meilleur Ouvrier de France. Nous l’avons suivi dans la difficile réalisation d’une coupe en cristal qui pourrait lui permettre de décrocher cette récompense suprême.

Si Benjamin n’avait pas été là, trouver un repreneur, eh bien, dis donc, je ne sais pas comment on aurait fait. L’entreprise aurait été morte. Elle était terminée. Je lui en suis reconnaissant. 

Christian Deichtmann