Rencontre : La Passion de Dodin Bouffant

Interview exclusive de Juliette Binoche et Trần Anh Hùng

Pour les Fans de Culture de France Télévisions, nous sommes allés à la rencontre de Juliette Binoche et de Trần Anh Hùng pour le film « La Passion de Dodin Bouffant », une coproduction France 2 Cinéma et un partenariat France Télévisions, en salles le 8 novembre 2023.

Juliette Binoche - La Passion de Dodin Bouffant

 


De l’union passionnée d’Eugénie et Dodin Bouffant naissent des plats tous plus savoureux et délicats les uns que les autres, qui vont jusqu’à émerveiller les plus grands de ce monde. Mais, pour garder sa liberté, Eugénie n’a jamais voulu se marier avec Dodin. Ce dernier décide alors de faire quelque chose qu’il n’a encore jamais fait : cuisiner pour elle.

Trần Anh Hùng, le réalisateur, qui a reçu le Prix de la mise en scène lors du dernier Festival de Cannes, et Juliette Binoche, l’interprète d’Eugénie, reviennent sur le tournage de ce film historique, tiré d’un roman de Marcel Rouff, paru en 1924 (La Vie et la Passion de Dodin-Bouffant, gourmet aux éditions Menu Fretin).

De quoi parle La Passion de Dodin Bouffant
Juliette Binoche : Il faut aller voir le film.

Trần Anh Hùng : C’est d’abord une histoire d’amour entre Dodin et Eugénie.

J. B. : Ils forment un binôme et ils font des plats extraordinaires.

T. A. H. : D’Eugénie, qui est quelqu’un qui cherche à avoir un métier plutôt qu’à être la femme d’une personne.

J. B. : De l’extérieur, ça paraît assez machiste et, à la fois, ça paraît très féministe. C’est assez contradictoire, mais je pense que le film provoque ça.

T. A. H. : Et c’est cette résistance face à Dodin qui crée vraiment la qualité de la relation amoureuse.

J. B. : Et puis comme on a quelques points en commun passés avec Benoît (Magimel), puisqu’on a une fille et qu’on a vécu ensemble, donc les vingt années dont on parle dans le film, elles étaient là, sans qu’on ait à travailler quoi que ce soit. On était portés, je pense, par nos non-dits, nos silences. Tout ce que le passé a fait pour nous.

S’agit-il d’un film sur la gastronomie ? 
J. B. : Je crois que ce film, c’est une expérience à vivre comme on peut expérimenter un repas délicieux.

T. A. H. : La grande difficulté de faire un film sur la gastronomie, c’est que, très souvent, on ne donne pas assez part à la gastronomie, parce que très vite le drame, l’histoire du film va prendre le dessus.

J. B. : Mais je crois que ce qui est le plus marquant dans le film, c’est ce qui se passe dans les sentiments. Ces sentiments sont à la fois contradictoires parce que la mort ne passe pas loin et à la fois c’est complètement vivant. Et puis ils vivaient dans un temps différent, qu’on a oublié dans les grandes villes, dans un temps où on peut écouter des oiseaux, où on peut sentir le vent sur son visage. Il y a ce sens de la vie qu’on a quelque part perdu dans les villes.

T. A. H. : Indépendamment du thème, c’est aussi la qualité du film et sa capacité à créer du sens et des émotions qui vont toucher ou pas le public. 

Comment avez-vous accueilli la sélection du film aux Oscars ? 
T. A. H. : J’ai accueilli la nouvelle de la sélection de la France pour que le film la représente aux Oscars avec beaucoup de joie, évidemment.

J. B. : Avec étonnement et avec joie, parce que je sais que c’est énormément de travail, surtout pour Trần Anh Hùng qui doit aller voyager de ville en ville et de pays en pays.

T. A. H. : Quand vous avez fait un film, vous avez dépensé beaucoup de temps et d’énergie dessus. Vous espérez toujours l’accompagner le plus loin possible. Et donc cette course aux Oscars, c’est beaucoup de travail. Et je suis ravi de faire ce travail.

J. B. : C’est un film qui a ses chances, je pense, aux Oscars.

Quel est votre plat pour séduire quelqu’un ? 
J. B. : Un bon plat de pâtes ! 

T. A. H. : Pour l’instant, j’ai fait un seul plat pour séduire ma femme. C’est du coquelet avec des champignons cuit dans du cidre.

J. B. : Moi, j’aime bien les plats familiaux. Le pot-au-feu, par exemple, je trouve que c’est un plat que tout le monde aime, parce qu’il a ce côté réchauffant.

T. A. H. : Je l’ai fait trois fois. La première fois, c’était une réussite totale. La deuxième fois, ce n’était pas terrible et la troisième fois, c’était catastrophique.

Pour vous culture, rime avec…
T. A. H. : Culture, ça rime avec tout ce qui fait la vie. Voilà, le reste est accessoire. Seule la culture va survivre.

J. B. : C’est rentrer dans un monde. Et on a besoin qu’à travers ce monde se révèle quelque chose de nouveau.